Transmission de commerce : les repreneurs ont-ils changé de profil ?

1. Les salariés en reconversion : une vague de fond

Selon le Conseil National du Commerce, près de 38 % des repreneurs de fonds de commerce en 2024 étaient engagés dans une reconversion professionnelle. Il s’agit pour beaucoup d’anciens cadres ou salariés, souvent issus du secteur tertiaire (banque, communication, informatique) ou de l’industrie, qui aspirent à un nouveau souffle professionnel.

Plusieurs motivations reviennent de manière récurrente : la quête de sens et d’indépendance, le désir de se réapproprier leur temps et leurs choix, et parfois la nécessité de rebondir après un licenciement ou une crise personnelle. Ces profils, très organisés et méthodiques, voient dans la reprise d’un commerce une opportunité de se projeter rapidement dans un projet concret, porteur de valeurs humaines et d’utilité locale.

Ils investissent souvent dans des activités en lien avec leur passion (épicerie fine, librairie, café culturel…) et n’hésitent pas à se former au préalable (CCI, organismes spécialisés, incubateurs), ce qui en fait des repreneurs sérieux, avec une vision structurée.

2. Les jeunes diplômés : une génération plus audacieuse

Les moins de 30 ans constituent désormais 12 % des repreneurs de fonds de commerce en France, un chiffre en progression régulière depuis 2020. Cette génération, parfois qualifiée de “post-startup”, voit dans la reprise une manière plus rapide et plus sûre d’accéder à l’entrepreneuriat qu’un lancement ex nihilo.

Leur appétence se porte sur des commerces alignés avec leurs valeurs : circuits courts, éco-responsabilité, transparence. Ils investissent volontiers dans des concepts durables ou dans le secteur de la seconde main. Leur approche est souvent hybride, mêlant activité physique(boutique ou local) et stratégie digitale : click & collect, e-commerce, réseaux sociaux, branding.

Ces repreneurs misent sur l’identité de marque, la narration et la différenciation, et apportent une nouvelle énergie au commerce de proximité, souvent en modernisant l’offre ou l’expérience client.

3. Les investisseurs “non exploitants” : une logique patrimoniale

Un autre profil de repreneur émerge discrètement mais sûrement : les investisseurs non exploitants. Présents notamment dans les zones stratégiques (centres-villes dynamiques, zones touristiques, stations balnéaires), ils achètent des fonds de commerce non pas pour les exploiter eux-mêmes, mais pour les intégrer à un portefeuille patrimonial diversifié.

Ils recherchent en priorité des activités rentables, avec une structure d’exploitation déjà en place, qu’ils confient à un gérant salarié ou à un franchisé. Ce modèle attire particulièrement les professions libérales, les retraités actifs ou les familles souhaitant “placer” un capital tout en générant un revenu régulier.

Leur vision est financière avant tout : rendement net, valorisation du fonds, potentiel de revente à 5 ou 10 ans. Ils sont souvent bien accompagnés (conseillers en gestion de patrimoine, notaires) et apportent un regard “investisseur” sur l’activité, ce qui peut aussi représenter un atout pour assurer la pérennité d’un commerce bien positionné.

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Quelques chiffres clés sur le marché de la reprise

• 31 703 ventes de fonds de commerce en France en 2024, en hausse de 2,5 % par rapport à 2023
• Prix moyen de cession : 258 314 €, avec des pics à plus de 400 000 € dans certaines activités commerciales (supermarchés, restauration)
• Taux de survie à 3 ans : 92 % pour les entreprises issues d’une reprise, contre 75 % pour les créations ex nihilo
• Les secteurs les plus repris : restauration traditionnelle (4 624 opérations), restauration rapide (3 139), cafés (2 518)

Conclusion

Les contours du repreneur type ont largement évolué au fil des dernières années. Aujourd’hui, reprendre un fonds de commerce attire des profils aussi variés que complémentaires : salariés en quête de sens et d’indépendance, jeunes diplômés portés par l’envie d’entreprendre avec impact, ou encore investisseurs à la recherche d’opportunités patrimoniales.

Cette diversité reflète une mutation en profondeur du tissu commercial français, où le commerce de proximité ne se transmet plus simplement comme un outil de travail, mais comme un véritable projet de vie ou de placement structuré. Chaque repreneur apporte ses leviers : des compétences en gestion, du savoir-faire numérique, de nouvelles valeurs ou une logique d’investissement long terme.

Pour les cédants comme pour les professionnels de la transmission, comprendre ces profils est devenu essentiel pour adapter son discours, valoriser les bons atouts, et favoriser une reprise fluide, durable et alignée avec les aspirations de chacun.

Sources :

• Étude Altares 2025 sur les     ventes de fonds de commerce
• Rapport du Conseil National du     Commerce – Transmission-Reprise d’entreprise, mars 2025
• Statistiques création     d’entreprise en France 2025 – Le Blog du Dirigeant